Le lundi 23 juin 2014, on apprend que l'un après l'autre, plusieurs députés se sont retirés de la liste des honorables signataires de la proposition de loi portant modification de l'article 18 du statut de la magistrature. Les honorables Nazaire Sado, Cyriaque Domigo et Claudine Prudencio ont écrit au Président de l'Assemblée nationale à ce sujet. Actuellement, la liste des 45 députés auteurs du texte s'est beaucoup raccourcie.
Le projet et la polémique
On se souviendra qu'à la mi-juin 2014, les 45 députés en question ont déposé une proposition de loi visant à modifier l'article 18 de la loi n°2001-35 du 21 février 2003 portant statut de la magistrature.
Dans sa formulation, le texte visait tout simplement à interdire les magistrats de toute activité syndicale et politique. Depuis le 20 mai, ces derniers ont en effet renoué avec leur mouvement de grève abandonné en mars 2014. Rappelons que cet arrêt de travail commencé en décembre 2013 avait pour objectif d'exiger entre autres la correction de certaines nominations irrégulières faites par le gouvernement. Mais en abandonnant à nouveau les prétoires, les magistrats ont estimé que le gouvernement n'a pas respecté ses engagements qui ont donné lieu à la suspension de la grève, à savoir la correction des nominations incriminées.
Se peut-il que les députés se soient sentis gênés par ces mouvements intermittents ? La conséquence est en effet la paralysie de l'appareil judiciaire avec beaucoup de désagréments pour les justiciables.
Quoi qu'il en soit, la réaction des mis en cause a été épidermique. Michel Adjaka, Secrétaire général de l'UNAMAB (Union nationale des Magistrats du Bénin) s'est révélé d'un véritable activisme contre le projet via les réseaux sociaux. Chaque jour sur son mur Facebook, il publie moult messages, argumente, cite maints articles de la constitution, des accords internationaux et d'autres textes juridiques pour démontrer combien l'initiative des députés étaient illégale.
Les autres syndicats se mêlent à la danse
La contestation s'est amplifiée avec l'implication de l'intégralité des centrales syndicales. Par solidarité ou pour d'autres raisons, les « partenaires sociaux » se sont mêlés à la danse. Au cours d'une conférence de presse qu'ils ont donnée, les secrétaires généraux des centrales syndicales ont rivalisé de verve et de rhétorique pour dénigrer le texte et démontrer à quel point il était anticonstitutionnel et liberticide. Pour eux, ce n'était ni plus ni moins que la manifestation de l'intention inavouée d'opérer sournoisement une révision de facto de la constitution, sujet à polémique lui-aussi.
Pourquoi certains députés ont reculé ?
Que ce soit pour son ampleur ou pour d'autres raisons, le soulèvement s'est soldé par le constant du recul successif de quelques-uns des députés porteurs de l'initiative. Auraient-ils subi des pressions ? On se demande pourquoi ils ont préféré faire machine arrière. Peut-être se sont-ils convaincu qu'une loi n'est pas la meilleure formule pour régler le problème des mouvements de grève intempestifs. Les suspicions de velléités d'une révision constitutionnelle déguisée ajoutées à des accusations de corruption les auraient peut-être dissuadés. De toutes les façons, le destin de cette proposition de loi est loin d'être clair.
Agohoué Géraldo{jcomments on}