La journée nationale de l'arbre instituée par décret en 1985 est à sa 32ème édition ce 1er juin 2016. Depuis trois décennies, cette journée voulue pour rendre le Bénin vert, est suivie de campagne de reboisement sur tout le territoire. A l'édition 2015, plus de 11 000 plants ont été mis en terre.
De 1985 à nos jours, plusieurs autres projets et programmes de reboisement ont été initiés, le plus emblématique étant le projet "10 millions d'âmes, 10 millions d'arbres" lancé en juillet 2013 par le Président Boni Yayi.
Mais entre la mise en terre et la réalité sur le terrain, l'écart suffit à montrer que le bilan est mitigé. Autorités et citoyens s'accordent sur le défaut d'entretien et de suivi des espèces mises en terre, quand elles ne sont simplement pas détruites volontairement. Pour l'illustrer, il n'y pas mieux que la disparition de l'arbre planté par le Président Mathieu Kérékou en 1985, l'arbre symbole même du lancement de la journée nationale de l'arbre. C'était dans la commune de Sèmè-Podji. La logique du développement économique (qui n'est pas non plus au rendez-vous) a conduit à sa destruction comme l'explique Célestin Wankpo, officier conservateur des eaux et forêts :
"Le premier plant que le Président Kérékou a mis en terre à Sèmè-Podji (...), c'était sur la parcelle E2. La parcelle E2 a eu le malheur d'être contigu à la zone qui a été choisie pour la Zone franche industrielle. Une fois que la Zone franche industrielle s'est installée, les propriétaires terriens qui étaient dans ce domaine ont été expropriés et recasés sur le domaine de la parcelle E2, ce qui a fait partir notre forêt."
Repenser l'initiative
Après le constat du bilan mitigé, que faire ? Il faut repenser la campagne de reboisement, estime le conservateur de l'herbier national du Bénin qu'abrite l'Université d'Abomey-Calavi. Il a d'ailleurs plusieurs griefs contre la conduite actuelle des campagnes de reboisement :
"La journée nationale de l'arbre au Bénin mérite d'être repensée (...) sur plusieurs plans. Au premier plan, les espèces qu'on plante, souvent c'est des espèces qui ne peuvent être utilisées [que] comme bois de chauffe, à la limite comme bois pour les petits travaux de construction. On ne voit pas la restitution de l'environnement de départ. Et pour cette restitution, il faut qu'on (...) sélectionne des espèces indiquées pour chaque habitat, pour reboiser nos écosystèmes dégradés et avoir encore la nature, plus ou moins, de départ."
En outre, le conservateur de l'herbier national, reste sur sa soif en ce qui concerne le taux de réussite de chaque édition. Les chiffres intéressants selon lui seraient plutôt ceux du nombre d'arbres qui ont bénéficié de l'entretien nécessaire à leur développement. "Si on arrive à planter 10 arbres bien entretenus chaque année, ça vaut mieux que de planter 10 000 arbres, un million sans rien y trouver plus tard", lâche Yédomohan Hounnapkon .
Le suivi dû aux plants mis en terre doit donc se mettre en place. Jean-Marie Tonoukoin, secrétaire général national pour une gouvernance améliorée dans le sous-secteur charbon de bois, met aussi l'accent sur cet aspect des campagnes de reboisement. Pour lui, "l'arbre, c'est une vie. Il faut le modeler, il faut le conduire. S'il n'y pas le suivi, vous ne pouvez pas avoir le résultat." Pour ce faire, il propose de professionnaliser l'entretien des arbres, ce qui consistera pour l'Etat à dégager un budget pour recruter et rémunérer des agents à commettre à cette tâche, des agents sur qui pèsera dès lors une "obligation de résultat."
En conseil des ministres le 25 mai, le gouvernement a décidé de "donner une nouvelle dimension" à la journée nationale de l'arbre. Le ministre du Cadre de vie et du développement durable devrait faire un bilan officiel de l'initiative depuis son instauration.
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Vincent Agué (@afoukin)